dimanche 15 juillet 2007

Espace Temps

dimanche 15 juillet 2007

...mes bras pendent, j'appuie mon front contre le carreau. Cette vieille femme m'agace.Elle trottine avec entêtement, avec des yeux perdus . Parfois elle s'arrête d'un air apeuré, comme si un invisble danger l'avait frôlée. La voilà sous ma fenêtre. Le vent plaque ses jupes contre ses genoux.Elle s'arrête , elle arrange son fichu.Ses mains tremblent.Elle repart, à présent je la vois de dos.Vieille cloporte! Je suppose qu'elle va tourner à droite dans le boulevard Noir..ça lui fait une centaine de mètre à parcourir: du train dont elle va elle y mettra bien dix minutes, dix minutes pendant lesquels je resterais comme ça, à la regarder, le front collé contre la vitre.Elle va s'arrêter vingt fois, repartir s'arrêter...

Je vois l'Avenir.Il est là, posé dans la rue, à peine plus pâle que le présent .Qu'à t-il besoin de se realiser? Qu'est ce que ça lui donneras de plus? La vieille s'éloigne en clopinant, elle s'arrêt, elle tire sur une mèche grise qui échappe de son fichu.Ellemarche, elle était là, maintenant, elle est ici...
Je ne sais plus où j'en suis: est-ce que je vois ses gestes, est ce que je les prévois? Je ne distingue plus le présent de futur et pourtant ça dure, ça se réalise peu à peu; la vieille avance dans la rue déserte; elle déplace ses gros souliers d'homme.

C'est ça le temps, le temps tout nu, ça vient lentement à l'existence, ça se fait attendre et quand ça vient, on est écoeuré parce qu'on s'aperçoit que c'était déjà là depuis longtemps.La vieille approche du coin de la rue, ce n'est plus qu'un petit tas d'étoffes noires.Eh bien, oui, je veux bien, c'est neuf, ça , elle n'était pas là bas tout à l'heure.Mais c'est du neuf terni, défloré, qui ne peut jamais surprendre.Elle va tourner le coin de la rue, elle tourne-pendant une éternité.

(JP Sartre-La nausée)

10 commentaires:

Anonyme a dit…

La vieillesse est probalement le temps de la suffocante éternité. La voir en marche tue.

Mocka a dit…

la vieillesse est le temps où le corps commence à s'éteindre mais pas pour autant la vie.
Il faut voir la lumière tant qu'il y'a la vie ou bien il vaut mieux fermer l'oeil et feindre ne pas voir.
à bientot :)

Anonyme a dit…

tu es plus jeune que moi!

Mocka a dit…

ah bon!j'ai 183 ans ,toi combien?
entre nous j'ai arrété de compter à 8 ans. tous les chiffres au dessus je connais pas.donc je suis forcément plus jeune Madame!

Anonyme a dit…

depuis mes 40 ans je compte à l'envers...mais c'st de - en - crédible..
mamy Arthi

Mocka a dit…

Tout l'art est de savoir faire oublier aux autres son"vrai" âge.
Chez moi tu peux avoir 20 ans sans problème, c toi qui décide :)).

Heureuse de t'avoir "rencontré" Arthi

Anonyme a dit…

un peu plus de temps dans la salle de bains le matin et le tour est joué!!!!
Et si nous échangions nos liens?
J'aime bien venir rôder chez toi....
Arthi

Mocka a dit…

avec plaisir Madame

Anonyme a dit…

Il était temps... mais c'est fait: tu es chez moi!!!
et du même coup en feuilletant ton blog ,j'ai découvert que tu es une fille!
Même pas déçue, Arthi, mais plutôt ravie que des filles aussi écrivent bien.
bises (si je peux)
Arthi

Mocka a dit…

c'est bien que mes posts ne soient pas très imprégnés par mon identité féminine .
Merci merci.
à bientot

 
ANATOPIE © 2008. Design by Pocket